Face à la multiplication des vagues de chaleur, de plus en plus longues et meurtrières, une proposition de loi transpartisane soutenue par la Fondation pour le logement des défavorisés (ex Fondation Abbé-Pierre) sera déposée dans les prochains jours à l'Assemblée Nationale. Cette loi vise à interdire progressivement la location des logements sujets à la surchauffe estivale.
Avec le réchauffement climatique, certains logements deviennent invivables dès les premières chaleurs. Mal isolés, exposés plein sud, mal ventilés ou situés sous les toits, ces logements surchauffés – surnommés "bouilloires thermiques" – transforment le quotidien en véritable calvaire pour leurs occupants.
Qu’est-ce qu’une « bouilloire thermique » ?
Une bouilloire thermique est un logement qui surchauffe pendant l’été : plus de 30 °C le jour et 28 °C la nuit, pendant au moins 25 jours par an. Ces conditions extrêmes rendent le logement insupportable sans climatisation.
Le contexte actuel
Selon la Fondation pour le logement, un tiers des logements en France serait aujourd’hui concerné par le phénomène de bouilloires thermiques. Plus surprenant encore : 31 % des logements classés A au DPE présentent malgré tout un confort d’été insuffisant. En cause ? Des rénovations énergétiques souvent centrées sur l’isolation hivernale, qui peuvent accentuer la surchauffe en été lorsqu’elles sont mal conçues.
Le phénomène touche de façon inégalitaire : ce sont principalement les locataires, les jeunes adultes, les ménages modestes et les habitants des quartiers populaires qui en subissent les effets, souvent exclus des rénovations performantes. En 2024, la chaleur a causé 3 700 décès, selon Santé publique France — dont 75 % de personnes âgées de plus de 75 ans.
Objectifs principaux du texte
Intégrer le confort d’été au DPE
Renforcer l'indicateur "confort d’été" (actuellement très limité) dans le DPE.
Affichage obligatoire de cette note dans les annonces immobilières, comme c'est le cas actuellement pour la consommation énergétique et l'émission de GES.
Reconnaître en droit la précarité énergétique d’été
Intégrer la surchauffe estivale dans la définition de la précarité énergétique.
Interdire la location des pires logements
À partir de 2030, les logements "bouilloires" considérés indécents ne pourront plus être mis en location.
Obligation de rénovation progressive
Calendrier de rénovation pour aligner les logements sur les exigences de confort d’été.
Faciliter les protections contre la chaleur
Permettre l’installation plus aisée de volets, brise-soleil, etc., même en copropriété ou zone protégée (ABF), en abaissant la majorité requise et assouplissant les prescriptions. Près de 40% du parc immobilier ne possède pas de protections solaires (volets).
Interdiction des coupures d’électricité hors hiver
Instaurer un « service minimum » énergétique toute l’année pour permettre l’usage de ventilateurs ou climatiseurs.
Quels biens sont concernés ?
Les logements les plus à risque sont les petits appartements types T1 ou studio sous les combles. On constate parfois jusqu'à 10° d'écart entre un appartement en RDC et le dernier étage d'un immeuble.
L'exposition Sud et Ouest d'un logement contribue fortement à l'accumulation de chaleur, celle-ci étant amplifiée lorsque l'appartement ou la maison ne bénéficie pas de protections solaires.
Le calendrier estimé :
2025-2026 : adoption de la loi à l’Assemblée nationale
2028 (probable) : nouvelle version du DPE incluant le confort d’été
1er janvier 2030 : interdiction de louer les bouilloires thermiques les plus sévères
Les propriétaires bailleurs auront donc quelques années pour anticiper, isoler et adapter leurs biens.
Reste toutefois la question des Aides de l'Etat et du financement des travaux de rénovation dans un contexte où Ma Prime Rénov' est suspendue depuis 23 juin 2025 et jusqu'au 15 septembre 2025, pour faire face à l’engorgement des services de traitement des demandes d’aide et d’identifier les dossiers frauduleux.
Face à l’intensification des vagues de chaleur, cette future loi sur les « bouilloires thermiques » marque un tournant majeur pour le logement en France. Elle vise à garantir un meilleur confort d’été en intégrant cette notion au DPE et en interdisant à terme la location des logements les plus exposés à la surchauffe. Une évolution incontournable pour les bailleurs et les professionnels de l’immobilier, qui devront anticiper ces nouvelles exigences dès aujourd’hui.